Non, Monsieur le président, l’autonomie des femmes ne devrait pas faire débat !
Interviewé sur TF1 hier soir, le Président de la République s’est exprimé sur l’ouverture de la Procréation Médicalement Assistée à toutes les femmes, et, refusant de s’engager sous prétexte que « le politique ne doit pas brutaliser les consciences » a annoncé vouloir avoir un débat « apaisé » dans le cadre de la révision de la loi bioéthique en 2018.
Alors, de deux choses l’une : soit notre Président a la mémoire courte et a oublié la violence du débat sur la loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, soit il vient de marquer son mépris pour les femmes et les familles LGBTparentales.
Un débat « apaisé » avec « La Manif Pour Tous » ? Avec des gens qui traitent nos enfants d’Organismes Génétiquement Modifiés et leur prédisent une « douleur sans fin » ? Un débat où tout un chacun aura encore son mot à dire sur nos vies, nos corps et nos enfants ? Des religieux, des journalistes, des passants, des « experts » autoproclamés viendront juger nos familles et l’existence de nos enfants. Encore une fois ce sont les lesbiennes, les gays, les bisexuel-le-s et plus largement toutes les femmes que l’on va stigmatiser et qui devront subir des campagnes de dénigrement, du harcèlement sur les réseaux sociaux, une multiplication des insultes et des agressions comme en 2013.
On va poser la question de savoir si une femme seule, ou deux femmes en couple, peuvent élever un enfant au mépris du quotidien de centaines de milliers de foyers monoparentaux et homoparentaux. On va tenter de justifier le maintien d’une différence dans la filiation des couples hétérosexuels et celle des couples de femmes, comme si certaines familles étaient moins légitimes et qu’il fallait un Juge pour s’assurer de leur réalité.
Pour les droits sexuels et reproductifs des femmes il faudrait « respecter l’ensemble des convictions » ? Avortement, contraception, procréation médicalement assistée, à chaque fois ce sont des années de « débat », prétexte à des humiliations et violences de la part des réactionnaires de toutes sortes. Quand il s’agit des femmes, il faut bien réfléchir pour savoir si elles peuvent bénéficier des progrès de la médecine et il faut bien prendre son temps, quitte à laisser perdurer des situations dangereuses pour leur santé. Et surtout, il faut poser la question du remboursement d’une procédure identique alors même que les salaires des femmes sont encore largement inférieurs à ceux des hommes !
On va donc prolonger les affronts et les injures. Attendre, s’il n’y a pas de nouveau revirement d’ici là, les États Généraux de la Bioéthique. Ces états généraux sont une consultation de citoyens pilotés par le Comité Consultatif National d’Ethique qui a pourtant déjà rendu son avis – sans juger bon d’auditionner ni les femmes, ni les familles concernées. Comme si, en l’absence d’homme dans le couple, on ne pouvait pas faire confiance aux femmes pour prendre la décision d’avoir ou non un enfant…
Nous avons assez attendu. Comme l’a dit M. de Rugy, Président de l’Assemblée Nationale, tous les éléments du débat sont connus ! Nos vies et nos familles ne sont pas une question d’éthique. La PMA est ouverte pour les femmes hétérosexuelles en couple, même lorsqu’aucune cause médicale n’est trouvée à l’infertilité du couple, la question d’éthique est donc tranchée depuis longtemps. Chez nos voisins européens qui ont l’expérience de la PMA accessible à toutes, tout se passe très bien. L’opinion publique française y est favorable à 64%. Alors que chaque jour, des femmes luttent pour essayer d’avoir un enfant avant qu’il ne soit trop tard, quitte à s’exiler en Espagne ou en Belgique, il s’agit maintenant de ne plus discriminer en raison de l’orientation sexuelle ou du statut conjugal d’une personne.
Nous en avons assez de servir de chiffon rouge pour occuper les médias pendant des réformes contestées. Nous attendons un geste fort de la part du gouvernement ou des parlementaires, qu’ils s’engagent pour les droits des femmes et contre les discriminations en ouvrant la Procréation Médicalement Assistée et l’établissement de la filiation par reconnaissance en mairie avec une loi dédiée, déposée d’ici la fin de l’année.