La CEDH botte en touche et rappelle que l’établissement de la filiation et la définition du mariage restent des prérogatives des états membres -Pour l’Inter-LGBT, la balle est plus que jamais dans le camp du législateur
Ce jeudi 15 mars 2012, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a rendu une décision très attendue par les associations LGBT concernant l’affaire Gas et Dubois contre France.
L’affaire concernait le refus de l’adoption simple par une femme de l’enfant de sa partenaire. La Cour de Cassation considére en effet que l’adoption a pour effet de transférer l’autorité parentale à l’adoptante, en en privant la mère biologique, ce qui n’est pas dans l’intérêt de l’enfant. En effet, la seule exception (article 365 du Code civil), qui prévoit la partage entre l’adoptant et le parent biologique ou légal, concerne l’adoption de l’enfant du conjoint et repose donc sur l’existence d’un mariage, lequel n’est pas accessible en France aux couples homosexuels. Cette solution, posée par la Cour de Cassation le 20 février 2007, a été réitérée depuis à plusieurs reprises (19 décembre 2007, 6 février 2008, 9 mars 2011).
Le Conseil constitutionnel s’était alors vu transférer le 8 juillet 2010 une question prioritaire de constitutionnalité portant sur cette disposition du Code civil en ce qu’elle serait contraire d’une part au droit à mener une vie familiale normale en instaurant une discrimination entre les enfants en raison du statut conjugal de leur parents, et d’autre part au principe d’égalité devant la loi en instaurant une discrimination entre les couples en raison de l’orientation sexuelle, puisque les couples de même sexe n’ont pas accès au mariage. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 6 octobre 2010, avait botté en touche et renvoyé la balle au législateur, considérant « qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur les conséquences qu’il convient de tirer, en l’espèce, de la situation particulière des enfants élevés par deux personnes de même sexe ».
L’affaire « Gas et Dubois contre France »
Parallèlement à cette question prioritaire de constitutionnalité, un autre couple de femmes avait saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour contester la conformité de l’article 365 du Code civil avec les dispositions de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. A l’instar du Conseil Constitutionnel dans sa décision du 6 octobre 2010, la CEDH a jugé que le droit à la vie privée et familiale n’est pas atteint de façon discriminatoire par rapport aux couples hétérosexuels, mariés ou non, par cette disposition du droit français. La Cour estime en effet qu’on ne peut pas considérer qu’un couple non marié se trouve dans une situation juridique comparable à celle d’un couple marié lorsqu’il est question d’adoption par le second parent, et que « la Convention européenne des droits de l’homme n’impose pas aux Gouvernements des Etats Membres d’ouvrir le mariage aux couples homosexuels, et que, lorsqu’ils décident de leur offrir un autre mode de reconnaissance juridique, ils bénéficient d’une marge d’appréciation quant à la nature exacte du statut conféré ».
Une décision qui rappelle avec force, en pleine campagne électorale, que la balle est dans le camp du législateur
La CEDH a rendu une décision conforme à sa jurisprudence, qui considère que la question de l’ouverture du mariage aux couples de même sexe relève d’une décision du législateur national. L’Inter LGBT rappelle qu’il est plus que jamais nécessaire que le législateur ouvre le mariage à tous les couples, afin de remédier à cette discrimination entre les couples à raison de leur orientation sexuelle et entre les enfants en raison du statut conjugal de leurs parents.
L’Inter-LGBT rappelle que plusieurs centaines de milliers de familles homoparentales existent en France et qu’il est inadmissible qu’elles et leurs enfants persistent dans cet état d’insécurité juridique du fait de l’impossibilité de se marier.
D’autre part, l’Inter-LGBT rappelle les revendications qu’elle porte dans le cadre de la campagne électorale : ici
Contact presse : Nicolas Gougain, Porte parole de l’Inter-LGBT, 06 77 87 37 00, nicolas.gougain (at) inter-lgbt.org