Nos corps, nos droits, vos gueules !
Texte d’appel de la Marche des Fiertés de Paris et Île-de-France 2022
Parce que nos corps nous appartiennent, parce que nos droits sont inaliénables, parce que la parole LGBTQIphobe et surtout transphobe, s’est banalisée, répandue, propagée, jusqu’au plus haut niveau et parce qu’il est temps que ça cesse.
Parce que depuis des mois, que ce soit dans les médias ou dans la bouche de politiques et de pseudos spécialistes, une parole décomplexée qui remet en cause nos droits, nos vies, nos existences, s’est démultipliée et que les pouvoirs publics n’ont rien fait pour nous défendre nous abandonnant, livré·e•s aux hordes de nos ennemi·e·s.
Parce que les personnes concernées sont trop souvent mises de côté, ignorées, niées même dans ce qu’elles sont. Ces dernières années, les exemples se sont multipliés, la liste est longue, trop longue, des normes et des lois adoptées sans même se soucier de nos avis, voire contre nos droits les plus élémentaires.
Parce que les dernières campagnes électorales se sont déroulées, une fois de plus, à grand coup de mensonges nauséabonds et populistes, en invisibilisant nos aspirations à l’égalité dans une société enfin solidaire. Alors que l’Inter-LGBT a développé une plateforme « Agir Pour » visant à faire 100 propositions concrètes aux candidat·es, un silence méprisant nous a été opposé.
Parce que des propos démagogues et mensongers ont continué à être proférés sur le compte des personnes LGBTQIA+, désignées comme des ennemies au nom de la croisade contre le fantasme d’un wokisme tout puissant.
Leurs (in)actions : nos mort·es !
Nous n’acceptons pas qu’une institution comme la Dilcrah, censée s’opposer aux discriminations et défendre les personnes trans, maintienne à la présidence de son Conseil scientifique (qui se donne pour missions “d’irriguer, par ses recommandations et ses orientations, l’action des pouvoirs publics” notamment sur les questions LGBT) une personne membre d’un collectif transphobe qui appelle ouvertement et publiquement à faire des thérapies de conversions sur les jeunes personnes trans (pourtant interdites en France depuis janvier 2022) et lutte contre des pratiques qui n’existent pas (interdiction des opérations de changement de sexe pour les mineur·es).
Nous n’acceptons pas l’indécence que constitue le fait, que dans des institutions publiques comme partout ailleurs dans la société, et notamment dans la presse, la parole réactionnaire, voire négationniste soit considérée comme un “sujet de débat” alors que nos vies sont en jeu, que cette parole tue ou blesse tant d’entre nous. Les droits des personnes LGBTQIA+ ne relèvent pas d’une idéologie qu’il faudrait combattre mais d’une aspiration aussi légitime qu’élémentaire à accéder aux droits humains fondamentaux, et notamment celui de disposer de nos propres corps.
Nous n’acceptons pas que soit refusé à une partie de la population le droit de choisir son activité et qu’elle soit pourchassée au motif de “la protection du plus grand nombre”. Non, ce n’est pas le travail du sexe qui entraîne la traite, l’exploitation et la pédopornographie. L’échec de la loi de pénalisation des clients de 2016 le rappelle chaque jour. Osez plutôt remettre en cause la toute-puissance du patriarcat et du libéralisme sans limite, osez cibler le vrai problème, osez admettre l’erreur de votre stratégie et cessez de stigmatiser toujours les mêmes. Où sont ces prétendu·es protectrices·eurs lorsque des travailleuses·eurs du sexe sont agressé·es et sauvagement assassiné·e•s ?
Nous n’acceptons pas que vous fassiez de la “PMA pour toutes” un dispositif au rabais qui exclut les personnes trans qui aujourd’hui doivent de nouveau choisir entre transitionner et changer d’état-civil ou fonder une famille. Le retour à la stérilisation forcée pour toute une communauté pourtant libérée de cette injustice depuis 7 ans est inacceptable. Et qu’en est-il de cette PMA pour les couples de femmes à qui l’on rend la procédure si longue et difficile ? Pour nous respecter, pour faire une vraie loi et nous offrir l’égalité, c’est : pour nous, par nous, et avec nous !
Nous n’acceptons pas votre obstination, malgré les condamnations de toutes parts (1), à mutiler des bébés et des enfants intersexes parce qu’iels ne rentrent pas dans les cases de vos normes binaires. Alors qu’elle aurait pû le faire l’année dernière, la France refuse toujours d’interdire ces pratiques d’un autre âge, car ce ne sont pas les concerné·es que vous écoutez, comme trop souvent c’est du côté de nos bourreaux que vous vous êtes rangés.
Sous les pavés nos colères…
Parce que chaque sujet nous concernant est un échec pour vous et une douleur pour nous. Parce que votre cis-hétéronormativité détruit un peu plus notre société, que des jeunes en souffrent et se tuent. Parce que les migrant·e·s LGBTQIA+ et les personnes vivant avec le VIH sont refoulé·e·s et meurent à nos frontières. Parce que la précarité, l’exclusion et la stigmatisation frappent toujours plus nos communautés. Parce que rien n’est fait pour nous protéger, nous émanciper et faire de nous des citoyen·nes à part entière.
Parce que ce sont nos corps et qu’ils sont nos orientations, nos identités, nos genres, nos expressions, nos vies, qu’ils sont divers, qu’ils peuvent être non-binaires et qu’ils nous appartiennent.
Parce que ce sont nos droits, qu’ils nous protègent, nous libèrent, qu’ils sont universels et ne peuvent disparaître, être remis en cause ou décidés sans nous.
Parce que nous n’avons que deux mots à dire aux marchand·es de haine et à celles et ceux qui les soutiennent (par opportunisme ou par conviction), à celles et ceux qui nient notre droit à l’autodétermination, à disposer de nos corps et de nos vies : vos gueules !!
Alors aujourd’hui, c’est notre colère et nos inquiétudes qui guident nos pas, côte à côte, face à de tels renoncements quotidiens, de tels accommodements d’une grande partie de la classe politique avec les idées réactionnaires.
L’Inter-LGBT vous appelle à défiler tou·te·s ensemble ce 25 juin, de la porte Dorée à la Place de la République, pour ne plus laisser se répandre les paroles nauséabondes et hostiles et nous défendre, pour défendre la justice, l’égalité, l’inclusion et l’autodétermination de tou·te·s !
(1) La France a été rappelée à l’ordre à plusieurs reprises par l’ONU sur ces “mutilations”, mais aussi
par la Dilcrah (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-
LGBT), le CCNE en 2019 ou encore le Conseil d’Etat
Associations cosignataires (mise à jour le 22/06/22) :
Acceptess-T, ACGLSF, Act-Up Paris, AIDeS, ADN (Au-delà Des Normes), ARDHIS, Association des Ami·es de Bonneuil, Bi’cause, Caelif, Le Carrefour des Chrétien.ne.s inclusif.ve.s, Centre LGBTQI+ de Paris et Île-de-France, Centre LGBTQI+ de Touraine, Collectif Rien à Guérir, CGT, Collectif Archives LGBTQI, Les Enfants d’Arc-En-Ciel, Fiertés Landes, Fiertés Pas-de-Calais, HES (Homosexualité et socialisme), Jeunes Ecologistes, Le Girofard, Les Ami.e.s du Patchwork des Noms, MAG Jeunes LGBT, Mobilisnoo, NOSIG (Centre LGBTQIA+ de Nantes), NPA LGBTI, OUTrans, Queer Pantin, Saint-Denis Ville Au Coeur, Les Séropotes, Shams France, SIL (Solidarité International LGBT), Stop Homophobie, STRASS, Trans3.0.
Si vous êtes une association et que vous souhaitez co-signer le texte d’appel, merci d’écrire à : contact@inter-lgbt.org